La maltraitance à l'enfance est responsable de jusqu'à 40 % des problèmes de santé mentale, plus tard dans la vie, conclut ce bilan des conséquences des abus, agressions et de la négligence sur une vie. Des données réactualisées qui dénoncent « ce fardeau choquant » en santé mentale et appellent à considérer la maltraitance de l’Enfant comme une priorité de santé publique.
Les auteurs rappellent que :
- la maltraitance infantile est définie comme la maltraitance physique, sexuelle et émotionnelle, ainsi que la négligence émotionnelle ou physique avant l'âge de 18 ans ;
- les problèmes de santé mentale sont actuellement la principale cause de charge de morbidité dans le monde et touchent 13 % de la population mondiale ;
- en Australie, lieu de l’étude, le suicide est la principale cause de décès chez les jeunes. De préédentes recherches révèlent que plus de 50 % des Australiens ont été victimes de mauvais traitements au cours de leur enfance.
Lutter contre la maltraitance, c’est éviter des millions de troubles mentaux
L’étude a pris en compte les problèmes de santé mentale suivants : les troubles anxieux, la dépression, la consommation excessive d’alcool et de substances, mais également l’automutilation et les tentatives de suicide (TS) et regardé la proportion de leur incidence associée à la maltraitance à l’enfance, auprès de 8.500 participants de l’Australian Child Maltreatment Study (2023) et de 15.893 participants de l’Australian National Study of Mental Health and Wellbeing (2020-2022) et de l’Australian Burden of Disease Study (2023). L’analyse conclut que la maltraitance à l'enfance est impliquée dans :
- 41 % des TS ;
- 35 % des cas d'automutilation ;
- 21 % des cas de dépression.
Pris ensemble ces résultats envoient un signal d’alarme pour que la maltraitance et la négligence envers les enfants soient traitées comme une priorité de santé publique : l’auteur principal, le Dr Lucinda Grummitt, du Centre Matilda de l'Université de Sydney commente : « ces résultats sont dévastateurs et constituent un appel urgent à investir dans la prévention, le soutien individuel aux enfants et aux familles, mais aussi dans des politiques plus larges visant à réduire le stress vécu par les familles. Ces investissements contre la maltraitance des enfants pourraient permettre d'éviter des millions de cas de troubles mentaux ».
- Ainsi, en Australie, lieu de l’étude, si la maltraitance infantile était éradiquée, plus de 1,8 million de cas de dépression, d'anxiété et de troubles liés à l'usage de substances seraient évités. Mais ce n’est pas tout, éradiquer la maltraitance infantile en Australie permettrait aussi d’éviter, chaque année, 66.143 années de vie perdues (décès) et 118.493 années vécues avec un handicap, ce qui représente, au total, la perte de près de 200.000 années de vie en bonne santé, en raison de troubles de la santé mentale.
Il existe pourtant des interventions efficaces, telles que des programmes de soutien aux enfants victimes de maltraitance ou des programmes d'éducation des parents, mais que la solution la plus durable pour prévenir la maltraitance des enfants est la prévention axée sur les politiques soutenant les familles. Ainsi, des interventions telles que les congés parentaux payés, les services de garde d'enfants abordables, les aides au revenu pour les parents demandeurs d'emploi et l’accès élargi au traitement et au soutien en santé mentale, pourraient faire toute la différence pour les enfants, les adultes qu’ils deviendront.
Source: JAMA Psychiatry 8 May, 2024 DOI: 10.1001/jamapsychiatry.2024.0804 Burden of Mental Disorders and Suicide Attributable to Childhood Maltreatment
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